Au fil de mes recherches, j’ai croisé de nombreux textes poétiques, scientifiques et historiques. Je rassemblais des images, réelles et imaginaires, actuelles et anciennes, et je redécouvris le magnifique récit de Julio Cortázar, « Los limpiadores de estrellas » (Les laveurs d’étoiles), qui devint l’inspiration première de l’œuvre. Dans cette histoire, les étoiles sont proches de l’humanité, en une relation étonnante où elles communiquent et jouent avec la lumière et l’ombre. Cortázar déploie un humour délicat et un talent rare pour partir de l’objet le plus banal (une boîte remplie de rondelles métalliques appelées « star washers ») et créer une atmosphère d’une intensité poétique saisissante, où tout peut coexister : banalité, comédie et joie, métaphores magiques et même quelques résonances politiques.
Ainsi, cette pièce parle des étoiles : de celles que l’on découvre, un après-midi, écrasées sur le bitume, jusqu’à celles qui brillent au firmament. Mais elle parle aussi des étoiles de ma vie : ces figures qui m’inspirent et accompagnent mon chemin de création. Étoiles, vent, ciel, firmament, poussière d’étoiles, reflets et luminosité, ténèbres, feu… et mémoire – mémoire ardente, mémoire mahlérienne.
Les couleurs de l’électronique et des instruments
Je suis compositrice, mais aussi improvisatrice, issue du monde de l’électronique, qui constitue pour moi une sorte de langue maternelle, avec ses sonorités et ses textures propres.
Dans cette œuvre, j’utilise la voix humaine, en particulier celle de la soprano Barbara Hannigan, qui chante, parle, respire, et improvise. Amies de longue date, nous avons entamé notre collaboration pendant la pandémie, alors que Barbara travaillait intensément sur la Symphonie n° 4 de Mahler, qu’elle dirigeait et chantait. Nous avons beaucoup échangé autour de l’idée mahlérienne de « Das Himmlische Leben », et Barbara m’a envoyé de nombreux enregistrements réalisés durant ses répétitions, ainsi que des sons plus abstraits, et sa respiration. Ces échanges se sont prolongés des mois durant, jusqu’à ce que nous nous retrouvions enfin en avril 2021, chez elle, en Bretagne, pour enregistrer et improviser ensemble. Nous sommes également allées au bord de la mer, où nous avons capté sa voix mêlée au vent et aux vagues.